Alors que vient de se tenir le 5ème congrès mondiale de la téléphonie mobile, le GSMA à Barcelone, une petite révolution est en marche: "le Mobile Money", une technologie qui pourrait révolutionner l’accès aux services financiers des plus pauvres dans les 10 prochaines années.
Fin 2009, malgré les succès de la microfinance, près de 3 milliards de personne n’ont pas accès à des services financiers fiables. Ces exclus de la banque ne peuvent simplement transférer de l’argent, épargner, obtenir une assurance ou un crédit pour développer une activité. Ces services ne leur sont accessibles que dans le secteur informel, le plus souvent à des coûts très élevés.
En 15 ans, les institutions de microfinance ont largement contribué à améliorer cet accès. En 1997 la microfinance permettait à 7 millions de personnes d’avoir accès à des services financiers de manière fiable, ils sont aujourd’hui 150 millions. C’est important mais c’est toujours très largement insuffisant.
Dans le même temps, la téléphonie mobile est accessible à près 5 milliards de personnes, soit quasiment l’ensemble de la population mondiale. Et l’industrie du mobile est florissante et d’un dynamisme sans pareil; elle a donc inventé ce qui pourrait révolutionner l’accès aux services financiers: le mobile money.
Tout commence il y a un peu plus de 5 ans au Kenya comme aux Philippines. Dans ces deux pays, les opérateurs leaders (Vodaphone au Kenya et SMART aux Philippines) décident d’offrir à leurs clients la possibilité d’utiliser leurs téléphones pour réaliser de petites transactions financières et en particulier pour payer des commerçants, payer des factures, se transférer de l’argent. Tout cela sans compte bancaire. Le Mobile Money permet de créer un porte monnaie électronique sur son téléphone portable et de l’utiliser pour réaliser de petites transactions.
En moins de 5 ans, ces deux opérateurs ont plus de 8 millions de clients chacun (soit 80% des clients de Vodaphone au Kenya). Au Kenya, ces 8 millions de clients s’échangent chaque mois plus de 250 millions d’Euros, en 1 an, près de 3 milliards d’Euros, soit plus de 15% du PNB Kenyan.
Ce sont typiquement des employés de Nairobi qui vont à la fin de chaque semaine envoyer une partie de leur salaire dans les campagnes à leurs parents. Au lieu d’utiliser les systèmes informels, en se faisant aider de chauffeurs de bus ou autres transporteurs se rendant dans leurs régions d’origine, ces travailleurs urbains utilisent aujourd’hui le téléphone portable pour effectuer ces transferts.
VERS LA BANQUE EN LIGNE SUR MOBILE
Dans les pays émergents, plus que partout ailleurs les 10 prochaines années verront la convergence entre l’accès à la téléphonie mobile et l’accès aux services financiers.
Trois chantiers sont en marche.
1. Le déploiement du mobile money: à l’instar de M-PESA au Kenya et de SMART aux Philippines, près de 120 opérateurs téléphoniques déploient leur offre de paiement ou de transfert d’argent par mobile. Chacun son service, Orange déploie Orange Money, Milicom développe Tigo, Zain : ZAP, etc..
2. L’utilisation par les Institutions de microfinance du mobile money pour faciliter les transactions de leurs clients. Partout les institutions de microfinance vont proposer à leurs clients d’effectuer leurs transactions (remboursement de crédits, épargne, etc), via le mobile money;
3. Enfin, la création de banques dédiées au mobile money. En partenariat avec les opérateurs téléphoniques, ces banques spécialisées vont offrir aux clients de ces derniers et en particulier aux clients non bancarisés des produits et services financiers adaptés.
Ces chantiers, et certainement bien d’autres, ont le potentiel de révolutionner l’accès aux services financiers dans les 10 prochaines années.
De la même façon que l’ensemble des pays émergents sont passés directement au téléphone mobile sans développer le filaire, il est bien possible que la banque de détail de demain soit une banque en ligne sur mobile.
Source: http://www.planete-plus-intelligente.lemonde.fr