Vaut-il mieux subir une situation insupportable, se sentir otage d'une entreprise, sous pression, frustré... ou bien décider de prendre en main son avenir professionnel ? Certes, la crise et le chômage incitent à la prudence. Cependant, malgré une période fragile en matière d'emploi, bien des cadres désirent changer de métier. 66 % d'entre eux confirment cette tendance dans une étude de l'Apec publiée en 2011.
Et même s'il n'existe aucune statistique approfondie sur le sujet, les nombreux témoignages collectés et cas rencontrés confirment que beaucoup osent franchir le cap. Et ne sont pas déçus.
Parmi les finalités les plus fréquemment énoncées par les candidats au changement, arrivent en tête l'épanouissement et la réalisation de soi, la qualité de vie, une quête de sens.
Les atouts des cadres
Mais plutôt que de savoir s'il est opportun de se reconvertir en période de crise, il vaut mieux se demander s'il est pertinent pour soi et sa carrière de s'engager dans une telle démarche : suis-je prêt pour une reconversion ? Est-ce que ma motivation repose sur des bases
solides ?
Si une décision de cet ordre se prend en toute connaissance de cause, la reconversion n'est pas un défi plus lourd aujourd'hui qu'hier. Elle devient même plus fréquente dans un contexte incertain où les parcours apparaissent comme moins linéaires qu'autrefois. Quant aux cadres en particulier, mieux armés que d'autres pour supporter les turbulences qu'entraîne une reconversion, ils ont acquis au cours de leur vie professionnelle, adaptabilité et flexibilité.
D'une part, ils ont dû faire leurs preuves lors de situations parfois périlleuses et appréhender des risques qui les préparent au changement.
D'autre part, ils ont développé compétences, capacités et ressources, qui leur permettent d'affronter l'inconnu et les peurs qu'engendre généralement une reconversion.
Face à un tel défi, les cadres semblent donc plutôt bien pourvus. Seul réel écueil pour certains d'entre eux, la crainte de s'écarter d'un modèle social longtemps idéalisé où études et carrière importent beaucoup. S'il s'agit pour ces derniers d'un sérieux frein au changement, c'est aussi une première barrière qui met à l'épreuve le projet.
Construire un projet solide
Le projet justement. Il est impératif d'en vérifier la viabilité au regard de l'environnement socio-économique. Pas question de partir sans filet. Mais une fois la pertinence des objectifs vérifiée, la reconversion représente une réelle opportunité. Qu'ils aient totalement changé de métier ou créé leur entreprise, ceux qui témoignent de leur expérience évoquent aisément les atouts d'une telle démarche.
Marc Grossriether sait par exemple désormais pourquoi il se lève le matin. Ingénieur informaticien pendant vingt ans, il fait le choix de se convertir à l'artisanat et au vitrail après une belle carrière de cadre. Quand il annonce sa décision, il en surprend plus d'un. Pas ses proches qui connaissent sa passion pour ce métier. Mais il ne s'est pas lancé sur un coup de tête. « J'ai minutieusement préparé mon projet. Je me suis renseigné sur les formations, j'ai continué à rencontrer des professionnels qui avaient un parcours similaire au mien. Je savais qu'il n'était pas facile de vivre en tant qu'artisan, mais ça m'a semblé jouable », m'a-t-il affirmé.
Des armes pour décrocher son billet
Etape souvent incontournable quand on veut changer de métier : la formation. Marc a suivi une formation de niveau CAP ainsi qu'un cursus complémentaire de 1 200 heures à la Maison du vitrail. A savoir : c'est parfois plus difficile pour les cadres d'obtenir un financement dans le cadre du CIF (congé individuel de formation). Un représentant du Fongecif, l'Opacif (organismes paritaires agréés au titre du congé individuel de formation) de référence, confirmait à Toutpourchanger.com que l'organisme « favorise plutôt les personnes peu qualifiées au départ et qui souhaitent progresser ».
Mais même si un « profil bac+5 n'est pas prioritaire », il peut opter pour un diplôme de niveau inférieur au sien et « décrocher un financement si la nature de son projet le justifie », rassure-t-il. Nombre de cadres témoignent des difficultés rencontrées au moment d'obtenir le financement pour accéder à la formation.
D'abord sceptique, le Fongecif a refusé à Bruno, un ingénieur grenoblois pourvu d'un bon salaire, la prise en charge de sa reprise d'études en tant que sage-femme, métier bien moins rémunérateur. Il s'est donc inscrit au Cned (centre national d'études à distance) afin de réviser le concours d'entrée de l'école.
Résultat : il a fait partie des 40 personnes retenues sur 800 candidats. Admis, il retourne frapper à la porte du Fongecif qui refuse à nouveau son dossier. Il leur a alors proposé d'être moins rémunéré que son salaire initial. Financement validé. La persévérance a payé.Bruno exerce aujourd'hui le métier de sage-femme.
On le constate chaque fois qu'un cadre s'y engage volontairement et y croit, la reconversion se révèle un excellent moyen de rebondir vers une seconde partie de carrière plus en adéquation avec ses aspirations. Et après tout, l'instabilité que nous connaissons aujourd'hui n'est-elle pas une incitation à passer à l'acte ?
Source: http://www.expectra.fr