INTERVIEW - En visite au Festival du vent, le président de l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise d'énergie) réagit à l'appel de Serge Orru et Anne Hidalgo à ne plus jeter les mégots en dehors des cendriers.
François Loos préside l’Ademe depuis décembre 2011. De passage à Calvi, dans le cadre du Festival du vent, il livre sa lecture du récent appel aux Français lancé par Anne Hidalgo et Serge Orru.
Quelle est votre réaction à la tribune de Serge Orru et Anne Hidalgo?
Je suis partisan du geste personnel. On n’arrivera pas à résoudre les problèmes de l’environnement si chacun n’y met pas du sien. Il ne faut pas s’imaginer qu’une fée va venir régler les problèmes au gouvernement. Il faut une implication personnelle des Français sur la question. Ca vaut pour les mégots, comme pour le chauffage à la maison, la voiture ou les transports en commun. Dans tous les domaines on s’aperçoit que l’individu doit prendre à son compte les préoccupations environnementales. Qu’il ne se dise pas : au fond, ce n’est qu’un petit geste, ça ne compte pas. Chacun à son niveau doit agir dans le bon sens. Si on jette son mégot, après on en fait de même avec sa boîte de hamburger, son sac en plastique, et, résultat, on finit avec des plages sales ou des îles de détritus en pleine mer.
Est-ce que ça ne signifie pas, en un sens, l’échec des campagnes de sensibilisation?
Je crois qu’il faut donner l’exemple. Que les collectivités donnent l’exemple. Vous ne faites pas changer les mentalités simplement en disant « attention au changement climatique », ça ne suffit pas. Même le fait de voir Sandy frapper New-York ne vous fera pas revoir votre façon de vous chauffer, de vous déplacer, ou de jeter vos mégots.
Les citoyens sont-ils seuls responsables? L’appel de Serge Orru et Anne Hidalgo se destine aussi aux fabricants de cigarettes, exigeant qu’ils installent de cendriers.
Serge Orru a de l’imagination, et c’est formidable. Dans son texte il touche tous ceux qui sont concernés. Comme lui j’appelle tout un chacun à prendre conscience qu’il a un rôle à jouer. Un fabricant peut s’intéresser à la production de cendriers individuels, à leur recyclage, ou à leur réutilisation ; une collectivité à l’installation de cendriers. Chacun à son échelle a une responsabilité immédiate. Mais pour que le citoyen change de comportement, les acteurs qui l’entourent doivent d’abord avoir une attitude claire.
A plus grande échelle, quelles sont les priorités à donner?
L’enjeu numéro 1 reste la rénovation thermique du bâtiment. C’est dans l’isolation qu’il y a le plus de gain d’énergie à dégager. On a autant de progrès à faire maintenant qu’on en a fait entre la dernière crise de l’énergie, dans les années 70 et 80, et aujourd’hui. Ca demandera du temps, mais si les Français n’agissent pas, personne ne le fera pour eux.
Rio + 20 a montré que les Etats rechignaient à mettre plus d’argent pour le développement durable. Dans ces conditions, comment avancer?
Ce n’est pas parce que les états sont en crise financière aujourd’hui qu’il faut qu’on s’empêche d’avancer chez nous. Autant je dis chacun à sa responsabilité, autant au niveau de la France il faut conserver notre allant, se tenir nos objectifs, voire en ajouter de nouveaux. Je suis pour qu’on crée des objectifs supplémentaires dans le domaine des déchets, aller plus loin sur le photovoltaïque… Ce n’est pas parce qu’il y a un problème de confiance, ou de méthode, au niveau international, que les Américains traînent les pieds, qu’on ne doit pas agir. Ce qui est valable pour l’individu s’applique aussi à l’Etat. Le fait que Rio 2012 va moins loin que 1992 en son temps, ne doit pas nous empêcher d’avancer. Rien ne nous interdit d’agir. On sait ce qui doit être fait, et on va le faire.
Source: http://www.20minutes.fr