L'Assemblée nationale a voté vendredi la mesure sur la taxation des plus-values de cessions d'entreprises, objet de la fronde des entrepreneurs autoproclamés "pigeons", dans la version revue et assouplie par le gouvernement.
Cette mesure, qui découle de l'alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail, avait été contestée par des entrepreneurs, soutenus par le monde patronal. La nouvelle version, votée dans le cadre du budget 2013, comprend de nouveaux abattements et revient sur la rétroactivité de la mesure.
Le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, a fait un long mea culpa tout en défendant la philosophie de la mesure, dans un débat qui s'est avéré bien plus apaisé que prévu. Les députés ont amendé à la marge le dispositif, dont le détail a été connu jeudi soir.
"Les mouvements qui ont eu lieu (...) ont créé un tort incontestable et regrettable à notre pays. (...) Le projet de loi déposé était, par certains de ses aspects, partiellement erroné (...) Si une erreur a été faite, le mieux est de la corriger le plus vite et le mieux possible", a jugé M. Cahuzac.
La députée écologiste Eva Sas a indiqué que cet amendement "laisse" son groupe "interrogatif". "Nous aimerions que vous ayez la même ouverture d'esprit vis-à-vis des ONG ou du monde paysan", a-t-elle lancé.
La droite a quant à elle tenté d'amplifier le recul gouvernemental.
"Vos propositions étaient inefficaces et injustes. Une véritable fronde vous conduit pour partie à revenir en arrière, et tant mieux. Beaucoup d'énergie de confusion auraient été épargnés si vous aviez pu consulter avant de proposer", a lancé la députée UMP Nathalie Kosciusko-Morizet.
La copie revue et corrigée du gouvernement prévoit notamment que les plus-values réalisées à partir du 1er janvier 2013 soient intégrées comme prévu dans le revenu imposable, mais avec des exemptions et des abattements pour les entrepreneurs cédant leur entreprise après l'avoir eux-mêmes développée, ou réinvestissant au moins la moitié de la plus-value.
Laure de la Raudière (UMP) a fustigée la version modifiée: "Une espèce d'usine à gaz fiscale (...) pas non plus conforme à la réalité des entreprises". Lionel Tardy (UMP), l'un des rares députés également chef d'entreprise, trouve le dispositif "moins pire". Mais selon lui "le mal est fait" avec "un signal très négatif aux créateurs d'entreprise".
"Avec Manuel Valls, il sera plus facile d'être Français, avec cet article, il sera plus difficile d'être entrepreneur", a attaqué Xavier Bertrand (UMP), jugeant le ministre "très amateur" en matière de finances et considérant au final que sa "longue plaidoirie" s'adressait en fait à sa propre majorité, irritée par la reculade.
Jérôme Cahuzac a défendu la philosophie politique de la mesure. "Vous ne souhaitez pas aligner la fiscalité du capital sur celle du travail, nous avons un autre choix", a-t-il martelé.
L'article corrigé présente encore, selon le président de la commission des Finances Gilles Carrez (UMP), un problème de rétroactivité faisant peser un risque d'inconstitutionnalité.
Nicolas Sansu (Front de gauche) a estimé quant à lui que "le gouvernement doit protéger les salariés de Petroplus ou Florange plus que le patron de Meetic". Il est opposé à tout assouplissement et s'est inquiété des 800 millions d'euros à trouver pour compenser les modifications.
Pour ce faire, le gouvernement va reconduire pour deux ans une majoration exceptionnelle de l'impôt due par les grosses sociétés et instaurée par son prédécesseur, pour un gain de 800 millions d'euros en 2013.
"C'est une erreur tellement énorme que vous abandonnez 80% du dispositif. Un amendement de précision à 800 millions sur un milliard, ce n'est pas un détail", s'est exclamé le centriste Jean-Christophe Lagarde, critiquant la volonté de "légiférer à partir de préceptes idéologiques".
Source: msn.com