Plusieurs élus basques français ont affiché leur scepticisme dimanche, après les propos de Manuel Valls démentant toute intervention dans l'extradition d'Aurore Martin, incarcérée en Espagne et qui s'apprête a déposer une demande de remise en liberté.
"Je ne suis pas convaincue par ses thèses (…). Je l'invite à venir s'asseoir autour de notre table républicaine au Pays basque", a déclaré à une correspondante de l'AFP la députée PS des Pyrénées-Atlantiques, Sylviane Alaux.
Pour Colette Capdevielle, autre députée socialiste des Pyrénées-Atlantiques, "ce sont des propos généralistes d'un ministre de l'Intérieur qui lutte contre le terrorisme. Entre la date de signature du mandat d'arrêt européen (MAE) (...) par les autorités espagnoles et aujourd'hui, un processus de paix s'est mis en marche" mais "il ne l'entend pas", a-t-elle regretté.
Cible de multiples critiques depuis l'arrestation d'Aurore Martin, le ministre de l'Intérieur a démenti dans un entretien à Sud Ouest Dimanche toute intervention dans l'arrestation et l'extradition jeudi de la militante, visée depuis octobre 2010 par un mandat d'arrêt espagnol (MAE) espagnol, validé par la justice française.
"L'exécution du MAE est une décision de la justice (...) appliquée sous l'autorité du parquet général de Pau. Ce n'est pas du ressort du ministre de l'Intérieur que je suis. Je n'ai pris ici aucune décision", a martelé M. Valls, invoquant la "séparation des pouvoirs".
Il a reçu vendredi et samedi plusieurs soutiens, parmi lesquels celui du premier secrétaire du PS, Harlem Désir, et du patron des députés PS, Bruno Le Roux.
Virulent, Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF, a fustigé un "mensonge d'Etat", disant ne "pas croire qu'il (Manuel Valls) n'est pour rien dans cette arrestation".
"C'est bien parce qu'il y a eu des interventions politiques par le gouvernement précédent qu'Aurore Martin n'avait pas été arrêtée jusqu'à présent", a renchéri Alain Iriart, conseiller général Abertzaleen Batasuna ("union des patriotes", gauche indépendantiste modérée).
Manuel Valls "a passé un deal avec son homologue espagnol lors de son dernier voyage à Madrid et il leur a +vendu+ l'arrestation et la remise d'Aurore Martin", croit savoir l'écologiste Martine Bisauta, adjointe au maire UMP de Bayonne.
Secrétaire départemental de l'UMP, Max Brisson affirme de son côté avoir des "indices concordants qui prouvent que les gendarmes ont arrêté Aurore Martin sur ordre".
Quant au sénateur (MoDem) des Pyrénées-Atlantiques, Jean-Jacques Lasserre, il manie l'image biblique : "au mieux, c'est Ponce Pilate (...) ce sont ses hommes qui ont procédé à l'arrestation".
Aurore Martin, 33 ans, a été arrêtée jeudi à Mauléon (Pyrénées-Atlantiques) puis remise aux autorités espagnoles.
Madrid lui reproche des "faits de participation à une organisation terroriste et terrorisme". En clair: avoir participé en Espagne à des réunions publiques comme membre de Batasuna ("unité", en basque).
Ce parti, considéré par l'Espagne comme le bras politique de l'organisation séparatiste basque ETA, est interdit outre-Pyrénées mais légal en France.
Incarcérée depuis vendredi à la prison Soto del Real, près de Madrid, Aurore Martin encourt jusqu'à 12 ans de prison.
Jointe dimanche par l'AFP, son avocate espagnole, Jone Celaya, du barreau de Bilbao (nord), a indiqué que sa cliente allait "bien" et qu'elle allait déposer lundi une demande de mise en liberté.
Me Celaya a confié nourrir peu d'espoirs que cette demande aboutisse car elle sera examinée par le même juge qui a placé sa cliente en détention. Elle s'est en revanche montrée plus optimiste pour le second recours "car l'affaire sera jugée par trois nouveaux magistrats".
Selon elle, les décisions devraient être rendues rapidement, comme c'est généralement le cas sur des questions de liberté.
Elle estime toutefois que sa cliente pourrait rester en détention "quelques semaines", voire "quelques mois".
Source: http://www.directmatin.fr